Le Sentier des Justes en Christ

Le Sentier des Justes en Christ

Chapitre quatre 1.6

       

 Pour la deuxième fois de la semaine, Soraya se rend chez Deveniez S.A, non pour cette fois enrager Laurence Guennac, mais pour sortir victorieuse du test perturbateur que son oncle aura prévu pour elle. Ce qu'elle ignore, c'est que ce sera un vrai challenge, puisque c'est le bras droit de son oncle qui a organisé « ce rendez-vous ».

 

         En effet, n'ayant pas eu le courage de piéger sa nièce, l'homme d'affaires s'est reposé sur Laurence pour cette tâche. Connaissant presque tout le personnel, cette dernière n'a pas trouvé mieux que de prévoir une « confrontation électro-choc ». Le P.D.G lui-même n'aurait jamais osé mettre en œuvre un examen si mesquin.

En remettant à Laurence Guennac le soin d'organiser un test singulier, il n'a certes, pas songé à l'inimitié existant entre sa nièce et son employée qui n'a pas digéré toutes les farces dont Soraya l'avait honorée. C'est vrai que cette dernière lui avait offert ses excuses, mais rien n'avait présagé qu'elles avaient été acceptées. La preuve, l'épreuve est herculéenne.

 

         Laurence Guennac s'est laissée envahir par une vengeance démesurée et l'a été jusqu'au bout de l'irresponsabilité en oubliant dans la foulée que son patron le sera tout autant à son égard. L'erreur de Deveniez a été de tout ignorer. Il sait seulement que sa nièce et un autre agent masculin vont se rencontrer dans le bureau du Directeur en l'absence de ce dernier et ceci pour mesurer la maturité et la maîtrise de Soraya. Ce que le P.D.G ignore aussi, c'est que ce sera l'agent 508 que devra affronter la jeune fille.

 

         Depuis des années, la Société Deveniez est truffée de caméras qui restent branchées la nuit et s'éteignent automatiquement la journée. Sauf circonstance exceptionnelle comme cette matinée, où Michel Deveniez a demandé l'allumage de celles qui relient la salle de conférences à celles de son bureau, afin d'assister en direct à l'affrontement des deux inconnus. Laurence Guennac s'est offert le plaisir de s'appliquer dans les moindres détails. Normalement, les deux personnes arriveront à dix minutes d'intervalle. Lui sera déjà dans le bureau en train de patienter. En ce qui concerne Soraya, son oncle n'a eu qu'à lui demander d'entrer dans son bureau si personne ne devait être à l'accueil.

 

         Ce jour-là étant semblable aux autres pour Soraya, la jeune fille est restée égale à elle-même quant à sa tenue vestimentaire : un jean, un long pull angora bleu turquoise et ses éternelles chaussures plates de couleur noire. Elle n'a rien changé à ses habitudes sinon, qu'elle a retenu ses cheveux roux par une grosse barrette bleu ornée d'un filet or. Elle aurait pu s'abstenir de son sac en bandoulière marron noué d'un vieux foulard violet, mais c'est sa façon provocante d'afficher sa personnalité. Après tout, c'est son oncle qui est venu la chercher et il sait qu'elle n'a rien des jolies filles de son entreprise.

 

         L'ascenseur qui la dessert au dernier étage lui confirme les dires de son oncle qui lui a demandé d’entrer même en l’absence de la secrétaire et effectivement, le hall est vide. Bien qu'elle soit certaine de ne pas trouver son oncle, Soraya frappe instinctivement à la porte directoriale en entrant.

Personne croit-elle trouver, mais il y a un officier debout avec sa casquette sous son bras gauche. Ils se défient un instant, puis l'inconnu intervient :

- Qui vous a permis d'entrer ?

- Et vous, qui êtes-vous ?

Au même moment, Michel Deveniez entre dans le grand salon de réunion en s'emparant de la première chaise qu'il attrape pour s'asseoir face au poste de retransmission et dit à la volée :

- Alors le match a commencé...

 

         Il s'interrompt. Ses yeux restent scotchés sur l'écran. Son visage devient livide tout comme le devient celui de Laurence Guennac de n'avoir jamais vu son patron exprimer ouvertement ses émotions. Il parvient juste à dire en vociférant calmement, entre ses dents :

- Vous n'avez pas fait ça ? Ma pauvre ! Si jamais… si jamais il arrivait quoi que ce soit à ma nièce...

        

         Le compte à rebours a commencé pour Soraya qui vit son canular. Deveniez est furax, mais ne peut pourtant intervenir sur la scène dramatique qui va se jouer devant ses yeux, surtout pour l'agent 508. Il espère juste qu'un des protagonistes de cette monstrueuse mascarade va claquer la porte en partant. Michel Deveniez qui les connaît tous les deux, prévoit à peu près la réplique de chacun...

 

         … Dans le bureau, le dialogue continue de fuser :

- Alors ? reprend l'homme, puis-je savoir ce que vous faites dans le bureau de mon patron ?

- Figurez-vous Monsieur je ne sais qui, dit Soraya sarcastique, j'ai rendez-vous, moi !

Rejetant la tête en arrière, l'individu se met à rire exagérément :

- Non, mais vous vous êtes regardée ? Mon patron n'aurait jamais convoqué une personne comme vous ! Un mérinos rouquin ! Je rêve !

 

         Son regard de braise s'attarde exagérément sur les boucles de sa chevelure opulente, puis poursuit glacial :

- Votre place n'est pas dans la Société Deveniez, mais dans les prairies !

La jeune fille voit rouge :

- Ma place est peut-être dans les prés, Monsieur le mal élevé, n'empêche que la vôtre est sûrement chez les cinglés ! J'ignore qui est votre mère, mais elle a sûrement oublié de bien vous éduquer en route et de vous apprendre à parler aux femmes que vous ne connaissez pas !

Il l'empoigne violemment par le bras sans se maîtriser et lui dit en rageant entre ses dents :

- Très chère sorcière, je me suis trompé, votre place est sur un bûcher ! Je ne permettrai jamais à un vulgaire mouton carotté et enragé d'insulter la seule femme qui ne m'ait pas déçu...

À son tour, il est coupé par Soraya dont les yeux virent maintenant au gris et qui se dégage de sa main de fer :

- Ah ça, j'avais vu que vous aviez un problème avec les femmes. Pour votre gouverne, sachez que je suis ici car mon...

Elle s'interrompt confuse d'avoir failli laisser échapper « mon oncle » et poursuit :

- Je suis ici car Monsieur Deveniez veut m’engager et j'ai mal à comprendre qu'il vous ait enrôlé dans son aventure ! C'est l'homme le plus juste et civil qui soit... tout le contraire de vous, piètre officier du dimanche !

 

         Dans la salle de conférences, malheureux, Deveniez se cache la tête entre les mains. Tout en admirant sa nièce de n’avoir pas dévoilé son identité, il sait qu'elle n'aurait jamais dû dire « piètre officier ».

Fou de rage, le jeune homme empoigne de nouveau Soraya, la toise et détaille ses tâches de rousseur en disant :

- Pour votre minois moisi, sachez...

- Lâchez-moi espèce de brute, vous me faites mal !

Ébahi, il lâche un rire bref et cinglant :

- Espèce de brute ? Mais vous vous êtes regardée, Cosette à la crinière rouge ?

- Lâchez-moi, je vous dis, vous êtes complètement fou !

- Oh non, je ne vous lâcherai pas ! Pas avant d'en avoir terminé avec l'épouvantail à moineaux repoussant que vous êtes ! Et vous allez m'écouter jusqu'au bout, je vous le garantis !

 

         Soraya se débat de toute ses forces, mais ne parvient  pas à s’échapper de la poigne masculine, l’inconnu reprend :

-  Primo, je ne suis pas une poubelle d'officier, je suis un des meilleurs agents de la Société et secundo je ne suis pas un matelot endimanché puisque j'ai donné ma vie pour la marine comme vous ne pourrez jamais donner la vôtre à personne ! Maintenant, en ce qui concerne votre présence ici, je ne suis pas stupide ! Je ne sais pas qui vous êtes Mademoiselle tâches de son, mais Monsieur Deveniez est l'homme d'une seule femme !

- Vous êtes malade ! Il faut vous faire soigner ! Vous rendez-vous compte de la façon dont vous me parlez ?

- Quand vous avez dit : « Je suis ici car mon… » c’est quoi ce « mon » ? Mon patron n’est à personne d’autre qu’à son épouse et s’il devait d’aventures y avoir une autre, ce qui est impossible, vous seriez la dernière sur la liste, tant vous êtes repoussante !

 

         Sur ces entrefaites, Soraya parvient à se libérer de son emprise et avant qu'ils ne réalisent ce qui arrive, la jeune fille lui octroie une gifle monumentale qui raisonne jusqu’aux tréfonds de l’oreille de l’officier. Et aussitôt fait, c'est lui qui la dessert en soufflet.

Rouge de rage, Soraya lui lance cinglante en se frottant la joue tout en essayant de contrôler ses larmes qui bordent ses yeux :

- J'ai trois frères, un père et un oncle Monsieur et aucun d'eux ne m'a jamais humiliée et frappée comme vous venez de le faire… vous m'écœurez… si je pouvais, je vous tuerais !

 

la suite est ici

 



14/03/2013
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