Le Sentier des Justes en Christ

L’image que nous nous faisons de l’Eglise du futur dépend grandement de ce que nous pensons de la structure de l’Eglise, de ses dirigeants et de sa façon de fonctionner. J’ai déjà fait plusieurs observations sur ces questions tout au long de ce livre.

Les structures d’Eglise

Un des problèmes principaux dans la plupart des structures de l’Eglise actuelle, c’est une mentalité hiérarchique. C’est une façon de penser qui apparaît dans la plupart des Eglises, parfois de manière limitée, parfois à l’excès. Cela contribue souvent, jusqu’à un certain degré, à créer un écart considérable entre les « professionnels » et les « laïcs ». Il devient vite évident que nous avons permis un système de leadership mondain et religieux dans nos Eglises en les institutionnalisant comme Constantin le fit au quatrième siècle. Donc, ceci fait également partie de la mentalité naturelle/charnelle.

Jésus les appela et dit: Vous savez que les chefs des nations les tyrannisent, et que les grands abusent de leur pouvoir sur elles. Il n’en sera pas de même parmi nous. Mais quiconque veut être grand parmi vous, sera votre serviteur et quiconque veut être le premier parmi vous sera votre esclave. C’est ainsi que le Fils de l’homme est venu, non pour être servi, mais pour servir et donner sa vie en rançon pour beaucoup. (Matthieu 20:25-28)

Bien entendu, ceci dépend aussi du caractère du dirigeant ou de la dirigeante, de son arrière-plan et de sa vision. Pourtant, considérons le rôle de ce que nous appelons souvent le pasteur principal, qui a la responsabilité finale de tout ce qui arrive dans l’Eglise et qui a l’autorité sous laquelle tout se fait. Je ne crois pas que ce rôle soit biblique.

S’il vous plaît, comprenez que le but n’est pas de saper les pasteurs, parce que nous maintenons de bonnes relations les uns avec les autres et parce que nous croyons que l’Eglise passe par une certaine évolution. Cependant, nous discernons un fait. En fin de compte, Jésus est en train de bâtir son Eglise et nous pouvons avoir cette confiance en lui qu’il est à l’œuvre. Il veut aussi élargir notre perspective en cette matière. Mon point de vue, c’est que chaque structure d’Eglise finira par être soit complètement changée, soit par entièrement disparaître avant l’apparition ultime de Jésus.

Le rôle attribué au pasteur principal finit souvent par lui être fatal. En outre, cela maintient souvent les membres à un niveau immature de fonctionnement. Le travail de ces pasteurs est très intense, il est louable et exige d’eux une grande dépense d’énergie. Ils aimeraient voir bien plus de gens assumer davantage de responsabilités spirituelles dans l’Eglise. Bon nombre d’entre eux vivent une telle frustration et pourtant, ils considèrent que cela fait partie de la description de leur tâche. De nombreux membres d’Eglise se laissent bercer, s’endorment et demeurent passifs car le/la pasteur(e) a pris comme tâche de porter seul(e) la charge spirituelle de travail. Ceci arrive indépendamment de son style de leadership, qu’il soit contrôlant, dominant ou même libéral. Jésus dit:

Ne vous faites pas appeler directeurs⁵, car un seul est votre Directeur, le Christ. (Matthieu 23:10)

⁵ Guide, maître, ou professeur (kathegetes, Strong G2519).

Les dirigeants

Est-ce que cela signifie qu’il n’y ait aucun conducteur?

Bien sûr que non. La Bible est très claire à ce sujet. C’est juste que l’on n’a jamais la charge de tout ou que l’on n’est jamais la principale personne en charge de tout.

Vous pouvez être un leader dans un domaine et dans un autre domaine, vous pouvez l’être moins ou même pas leader du tout. C’est une question de flexibilité.

C’est pourquoi je ne crois pas qu’un pasteur principal et des anciens devraient être désignés quand on implante une Eglise. La Bible décrit comment l’on nommait les anciens. Au fait, nommer quelqu’un signifie simplement reconnaître ce qui est déjà accepté par tout le monde. C’était une fonction bien connue à cette époque et dans cette société-là. Cela concerne une personne spirituellement mature qui est manifestement acceptée dans une grande mesure. Chacun fonctionne dans son onction, ses dons et ses talents, et tous s’accordent pour être mutuellement soumis les uns aux autres. Par exemple, une personne de l’équipe dirigeante peut recevoir une idée divine et la mettre en action. Les autres vont soutenir et se soumettre à cette personne (il ou elle) dans ce domaine. La prochaine fois, ce pourrait être le tour de quelqu’un d’autre dans l’équipe. En d’autres termes, il n’incombe pas à une seule personne d’avoir la responsabilité finale pour tout et de devoir y laisser sa marque. Sinon, le résultat en est souvent une grande somme de contrôle et un développement limité pour toutes les autres personnes. Ce principe s’applique aussi à tout autre membre de l’assemblée.

Actes 20:28 donne un enseignement sur les anciens qui ont été placés comme surveillants au milieu du troupeau, et non pas un enseignement sur des gens qui dominent les uns sur les autres.

Hébreux 3:17 dit que nous devons obéir à nos conducteurs et nous soumettre à eux. Ici, le mot « conducteur » signifie: ceux qui devancent, et cela veut effectivement dire qu’il doit y avoir un empressement à se laisser convaincre par eux et spécialement par l’exemple qu’ils donnent. Ceci va de pair avec un grand espace de liberté pour les initiatives personnelles des autres croyants, sans qu’il faille y apposer le label du nom de l’Eglise.

Je ne suis pas contre les programmes d’Eglise, mais trop de gens se cachent derrière ceux-ci et ne se mettent guère en action eux-mêmes. Le Royaume de Dieu est plus vaste que l’Eglise. Nous avons un Roi, un Royaume et une Eglise. L’Eglise est le moyen par lequel le Royaume est établi (Ephésiens 3:8-12). Il arrive fréquemment que l’on crée des activités afin de mettre l’Eglise sous les feux de la rampe. Cependant, on peut se trouver devant un cas d’idolâtrie à chaque fois que l’institution elle-même s’érige en tant que but en soi.

La couverture

Le concept d’avoir chacun une “couverture” joue également un rôle important dans de nombreux esprits, Eglises et dénominations quand on en vient à examiner des questions comme la structure de l’Eglise et de son leadership. On pose fréquemment des questions telles que: « D’où viens-tu? Quelle est ta couverture? Quelle est ton Eglise locale? Sous quelle autorité es-tu? Envers qui es-tu redevable? Ne devrait-il pas y avoir quelqu’un au-dessus de toi? » Ces questions trouvent leur origine dans des façons de penser variées. L’idée, c’est que vous n’avez le droit de vivre et de faire ce que vous faites que quand vous avez une couverture appropriée. On a le sentiment que ce n’est qu’alors que vous serez protégés contre les démons et contre les fausses doctrines. Il est faux de supposer que l’on est seulement sous autorité et en sécurité dès que l’on est membre d’une Eglise locale particulière.

Un jour, quelqu’un fit cette remarque pleine d’humour: “Ma seule couverture, c’est celle que j’utilise quand il fait froid la nuit. »

Ces inquiétudes à propos de la couverture de quelqu’un se fondent surtout sur une question posée à Jésus. Les principaux sacrificateurs et les anciens du peuple lui demandèrent par quelle autorité il agissait comme il le faisait (Matthieu 21:23). C’est ce qui a souvent conduit les gens à demander: Qui est ta couverture et sous l’autorité de qui es-tu? Et pourtant, le concept de couverture manque d’un sain fondement biblique et le fruit de cette mentalité a souvent été une fausse sensation de sécurité, le contrôle, la passivité et le découragement.

Il existe, de par le monde, de très nombreux petits groupes de gens ayant un berger et qui fonctionnent très bien de façon indépendante. Ils ont bien entendu besoin de recevoir apport et équipement de la part des apôtres et d’autres ministères. Mais, ils n’osent pas toujours demander de l’aide par crainte ou à cause d’une déception. Ils auraient certainement pu recevoir de l’aide, mais seulement à condition d’accepter de porter le nom du « ministère », de souscrire à leur idée de « couverture » et/ou de leur donner leur dîmes. Les vrais apôtres sont appelés pour le corps du Christ et ne sont pas essentiellement fixés sur leur propre dénomination et/ou leur groupe.

Le modèle de Jéthro contre le modèle de Dieu

Nous lisons le récit de la conversation de Moïse avec son beau-père, un homme nommé Jéthro, en Exodus 18. Jéthro avait vu comment Moïse avait été la seule personne à juger le peuple, jour et nuit. Il avertit celui-ci de ne pas continuer de cette manière car cela l’épuiserait complètement. Alors, il lui donna quelques conseils:

Discerne parmi tout le peuple des hommes de valeur, craignant Dieu, des hommes (attachés) à la vérité et qui haïssent le gain malhonnête; établis-(les) sur eux comme chefs de mille, chefs de cent, chefs de cinquante et chefs de dix. Qu’ils jugent le peuple en tout temps; qu’ils portent devant toi toute affaire importante, et qu’ils jugent eux-mêmes les affaires secondaires. Allège ta charge et qu’ils la portent avec toi. (Exode 18:21-22)

Nous apercevons ici comment Jéthro introduisit un concept hiérarchique de leadership et comment Moïse se contenta de l’appliquer. Moïse écouta son beau-père et fit tout ce qu’il avait dit. La Bible ne mentionne pas qu’il ait d’abord consulté Dieu à ce sujet.

Plus tard, nous voyons que cette structure n’avait pas le cœur de Dieu et qu’à la fin, Moïse lui-même n’y avait pas non plus gagné grand-chose. (Nombres 11). Quand le peuple se mit à se plaindre de nouveau, Moïse invoqua le Seigneur et dit:

Je ne puis pas, à moi seul, porter tout ce peuple, car il est trop lourd pour moi. Plutôt que de me traiter ainsi, tue-moi donc, si j’ai obtenu ta faveur, et que je n’arrête pas ma vue sur mon malheur. (Nombres 11:14-15)

Dieu lui ordonna ensuite de rassembler soixante-dix hommes, de ceux qu’il connaissait comme anciens et officiers d’Israël et de les amener à la tente de la rencontre (Nombres 11:16). Dieu prit de l’Esprit qui était sur Moïse et le plaça sur les soixante-dix anciens et officiers de telle sorte que Moïse n’ait plus à porter seul le fardeau du peuple (Nombres 11:17). Alors, ces hommes se mirent à prophétiser. Deux d’entre eux n’étaient même pas entrés sous la tente de la rencontre car ils étaient restés à l’arrière du camp, mais eux aussi prophétisaient là-bas (Nombres 11:25-26). Moïse en fut informé par son serviteur, Josué et il lui demanda de retenir ces hommes de prophétiser.

Mais Moïse lui dit : Es-tu jaloux pour moi? Puisse tout le peuple de l’Éternel être composé de prophètes, et veuille l’Éternel mettre son Esprit sur eux! Et Moïse se retira dans le camp, lui et les anciens d’Israël. (Nombres 11:29-30)

Ici, nous voyons que la solution au problème de Moïse n’était pas le concept hiérarchique de Jéthro quant aux dirigeants, mais que c’était plutôt l’ordre de Dieu de prendre soixante-dix hommes, de ceux qu’il connaissait comme anciens et officiers d’Israël. En toute logique, ces hommes avaient déjà été reconnus et acceptés.

Autorité, obéissance and soumission

A l’évidence, l’autorité vient de Dieu et il est celui qui la donne. Jésus dit que toute autorité lui a été donnée dans le ciel et sur la terre (Matthieu 28:18) et c’est un don qu’il fait à ses enfants. Donc, il n’y a pas d’autorité déléguée par une personne à une autre dans le Royaume de Dieu. Il n’y a que l’autorité déléguée par Jésus à ceux qui le suivent. C’est organique et d’ailleurs, nous voyons toujours que c’est la tête qui dirige le corps. Les royaumes de ce monde et le royaume des ténèbres fonctionnent par autorité déléguée. Pourtant, Jésus peut parler à n’importe quel croyant et chaque croyant (il ou elle) reçoit de lui son autorité. Dans l’évangile de Jean, Pilate interrogea Jésus sur l’autorité dont il se réclamait:

Jésus répondit: Tu n’aurais sur moi aucun pouvoir, s’il ne t’avait été donné d’en-haut. (Jean 19:11)

Quelqu’un peut réagir à l’autorité, mais il y a une importante différence entre l’obéissance et la soumission. L’obéissance est une action tandis que la soumission est une attitude. La Bible nous enseigne à être obéissants à Dieu, au gouvernement, à nos parents et aux législateurs, Dieu étant surtout celui à qui nous devrions obéir, bien entendu. Dans ce sens, une personne peut être désobéissante à une autorité naturelle tout en ayant quand même un esprit de soumission. Par conséquent, désobéir et garder en même temps une attitude de crainte et de respect, s’avère très différent que le fait de désobéir avec une attitude de rébellion et de sape. C’est que la soumission est une question d’attitude du cœur. Vous aurez alors la volonté d’écouter les autres, d’être transparents envers eux, d’être vulnérables et de considérer les autres comme plus importants que vous-mêmes.

L’autorité ne se fonde pas sur le rang ou la position, mais sur un caractère de nature divine et sur l’œuvre du Saint-Esprit en nous. Beaucoup de personnes dont le ministère et l’onction sont reconnus et acceptés sans discussion travaillent encore souvent en utilisant une structure hiérarchique strictement basée sur l’autorité. Un renouvellement de nos pensées continuera à se produire dans ce domaine. Il n’est pas question d’une hiérarchie. Il ne s’agit pas de la position de quelqu’un ou de domination. C’est fonctionnel. Il s’agit d’être en relation avec et de servir les autres. Il n’est pas question d’appartenir à une classe ou d’être un gourou, ni question de baser un système sur des titres ou des qualifications, mais il s’agit de la prêtrise de tous les croyants.

Chacun a l’autorité d’exécuter certaines actions. Dieu est la source exclusive de cette autorité. Le mot grec pour autorité est exousia et se rapporte à une action légale que l’on peut exécuter (Strong G1849). Dieu a donné autorité à tous les croyants. L’autorité de devenir enfants de Dieu, d’être propriétaires, de se marier ou de rester célibataires, de choisir ce qu’ils veulent manger et boire, de guérir les malades et chasser les démons, de bâtir l’Eglise, de recevoir des bénédictions de certains ministères, de gouverner les nations, de manger de l’arbre de la vie, etc.

Pourtant, la Bible n’enseigne nulle part que Dieu ait donné aux croyants l’autorité sur d’autres croyants. Dans le Nouveau Testament, une telle forme d’autorité n’est jamais liée à la direction d’Eglise. Il n’existe aucune forme d’exousia de ce genre entre croyants. De toute évidence, l’autorité au sein de l’Eglise diffère de l’ordre naturel qui a été établi dans le monde. C’est que l’Eglise n’est pas une organisation faite de la main de l’homme mais une organisation spirituelle. Par conséquent, c’est une autorité organique. Elle utilise le langage pour convaincre, exhorter et lancer des défis. Elle n’évite jamais les responsabilités des autres personnes. Chacun demeure responsable de ses propres actions et décisions. L’autorité organique implique une maturité spirituelle et développe la maturité spirituelle. Par contre, les leaders du monde naturel peuvent bien être moins matures que ceux sur qui ils ont autorité. Plus vous grandissez dans votre vie spirituelle, plus large deviendra votre autorité organique. Cela a à voir avec le respect que vous recevez en résultat de votre fiabilité et de votre service envers les autres, non pas à cause d’une position. C’est l’espèce d’autorité qui ne fonctionne que lorsqu’elle est issue du cœur de Dieu. Ainsi, si l’on encourage l’Eglise à faire quelque chose qui ne s’accorde pas avec la volonté du Seigneur, elle ne sera pas soutenue par l’autorité de celui-ci, même si la chose n’est pas contraire à la Bible.

En Actes 15, nous découvrons le récit d’un problème. On chercha à le résoudre à Jérusalem. Puis, nous lisons:

Car il a paru bon au Saint-Esprit et à nous … (Actes 15:28)

Ce n’est pas une autorité qui correspond à une hiérarchie allant du haut vers le bas, mais qui va de l’intérieur vers l’extérieur. Le Saint-Esprit qui vit en nous en est la source.

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